"Elle était donc couchée et se laissait aimer,
Et du haut du divan elle souriait d’aise
À mon amour profond et doux comme la mer,
Qui vers elle montait comme vers sa falaise."

La bataille venait tout juste de débuter… Encore que, il n’y avait pas grand monde. Konan et moi, une poignée de ninjas de bas étage qui se faisait massacrer par quelques shurikens de papier et rien que le vent, le vent qui soulevait nos cheveux et murmurait à nos oreilles une ode à l’amour…
Fermant les yeux afin de profiter de chaque parcelle de ses paroles, un nouvel individu vint bientôt se porter à nos cotés et je vis un nouveau cadavre ressuscité. Deidara était un membre de la première génération de l’akatsuki. Particulièrement impulsif, c’est lui qui avait réussi à tenir tête à Gaara afin de lui retirer son Bijuu. D’apparence androgyne, il était râleur et impulsif… Ce qui n’enlevait rien à ses capacités étonnantes et héréditaire. Unique représentant masculin de notre trio bien que je me considérais un peu à part, je vis bientôt le visage de Konan changer d’expression ce qui signifiait que ses mouchards de papier avaient certainement repéré des présences hostiles. Nos retranscrivant ce qu’elle sentait, elle nous apprit que le ninja copieur, Hatake Kakashi, comptait s’occuper de Deidara. Judicieux choix car même s’il était nukenin de rang S, le maitre de l’argile était faible en taijutsu, domaine dans lequel le porteur de Sharingan excellait… Mais avait-il conscience que ce n’était pas facile d’atteindre une cible mouvante ? Des rumeurs affirmaient qu’ils s’étaient déjà affrontés par le passé et que le Konohajin avait eu l’avantage. Peut-être était-ce un bon moyen pour lui d’avoir sa revanche…

« Et nous ? On affronte qui ? J’espère que nous n’allons pas mourir ! Si jeunes que nous sommes !
Moi j’espère surtout qu’il vaut la peine qu’on l’affronte… Heiwa, tu me laisses ta place ?
Je te laisserai le contrôle si jamais je suis en trop mauvaise posture…
Incompétence comme tu es, ça sera vite arrivé.
Jalouse… »

…Toi ma chère un adversaire veut te combattre personnellement…

La voix calme et légèrement hautaine de la femme aux cheveux bleus me ramena à la réalité et je tournai mon regard argenté vers celle-ci. Esquissant un sourire de remerciement sans non plus rentrer dans les extrêmes, l’identité de ce mystérieux adversaire était source de jubilation intérieure. Je n’avais que très peu d’ennemis, comme j’avais très peu d’ami, et j’étais assez étonnée de savoir qu’un individu souhaitait m’affronter en particulier. Une femme jalouse à qui j’aurais volé son amant le temps d’une nuit ? Un homme insatisfait déçu par ma non-coopération dans ses activités nocturnes ? Un ninja machiste qui n’aimait pas les Kunoishi et souhaitait m’écraser ? Les possibilités étaient nombreuses mais toutes aussi farfelues les unes que les autres. Détournant mes yeux de mes coéquipiers momentanés, je voyais déjà une lance électrique fuser vers Deidara. Rapide mais non mortelle, je connaissais cette technique et me demandai de quelle façon l’akatsukien allait l’éviter. Pour sa part, Konan semblait maitriser la situation en créant une pluie de feuille explosive alors je pris le temps de m’écarter d’un léger battement d’ailes avant de fixer celui qui se dirigeait souplement vers moi. Qui l’eut-cru…
Toujours aussi grand que dans mes souvenirs, ses cheveux d’un bleu ciel et son expression gourmande de sang, une sensation de déjà-vu gagna mon être tandis que la nostalgie s’installait en moi. Il s’était déjà approché de moi par le passé et nous avions échangé assez de paroles pour que je sache parler de lui sans prendre le risque de me tromper.

Grimmjow Jaggerjack… Murmurais-je, trop doucement pour qu’il m’entende à cette distance.

Nous ne nous étions jamais battus l’un contre l’autre. En tant qu’anciens membres du même village, je n’avais jamais compris pourquoi il n’avait pas suivit mon exemple et qu’il n’avait pas déserté. Panthère, son animal était l’exemple même de la liberté au grand air et pourtant il était resté enchaîné dans les principes tortueux et stupides des lois des villages… Si j’étais trop plongée dans ma solitude pour m’appesantir de compassion envers quelqu’un, je ne pouvais m’empêcher d’éprouver une pointe de tristesse à l’idée que cette panthère soit toujours réduite à l’état d’un animal domestiqué par Meï Terumi. Néanmoins, nos discussions sur les valeurs de la vie n’ont plus lieu d’être… Désormais tu es là pour m’affronter, sans doute pour me faire du mal et certainement dans l’intention de me tuer… Comme si le passé avait été effacé d’un coup de pinceau. L’art d’oublier… J’y excellais.
Lorsque je pus voir son visage avec netteté, je vis ses yeux de fauve se plonger dans le lac impassible des miens. L’ombre d’un sourire se dessinant sur mon visage fin et je portai ma main droite à mon cœur, la posant à plat sur ma poitrine. M’inclinant légèrement, certains prenaient ce salut pour de la soumission ou encore un moyen de s’excuser mais il s’agissait chez moi d’un geste de respect. Je pouvais affronter la pire des brutes indisciplinées, il n’en restait pas moins que je respectais tous mes adversaires sans exception. Sale manie que celle-ci, n’est-ce pas… ?

C’est un plaisir de te revoir… Lui dis-je tandis qu’il était à une dizaine de pas. A croire que la vie est joueuse, non ? Ecartons nous, les règles du jeu se doivent d’être respectées en toute intimité…

Lui tournant le dos tandis que je fermais les yeux, les sensations nouvelles envahirent mes sens et le monde me parut plus clair qu’il ne l’avait jamais été malgré mon handicape qui désormais n’en était plus un. On avait toujours tendance à sous-estimer ceux qui étaient porteurs d’une tare physique mais c’était en affrontant un aveugle que j’avais découvert… Qu’il était beaucoup plus fort que les autres. Merci de votre enseignement, il va m’être utile…
Atteignant un espace dégagé d’où on pouvait entendre les bruis sourds des affrontements d’à coté, nous étions néanmoins dans un lieu tranquille où nous aurions tout le loisir de nous battre. Repérant les obstacles aux infimes bribes de vent qui les effleuraient, j’entendais jusqu’à la respiration de Grimmjow qui n’était pas loin de moi tandis que l’odeur de son corps m’indiquait aussi ses mouvements. Au fond, étais-je vraiment aveugle… ?

« Il ne m’avait pas manqué ! Il est trop… brut !
Un homme qui n’est pas brut… est une femme.
Ou alors c’est qu’il est efféminé.
HAHA ! Comme quoi, la virilité… Ca tient à peu de chose. »

On dit que les hommes doivent faire le premier pas... Repris-je calmement en lui faisant face, les yeux toujours clos. Mais je suis déjà bien assez ravie que tu m’aies choisi comme adversaire, je vais donc commencer.

« Lançons un avant-goût, inutile de bourinner dès le début… Nous sommes des femmes, après tout. »

Mes shurikens m’avaient suivi, telle une myriade de petits oiseaux argentés suivant leur mère. Disparaissant dans un tourbillon vif de métal sans effectuer le moindre signe, ils se jetèrent sur mon adversaire tandis que je réapparaissais derrière lui. Mon corps transformé en métal ce qui me donnait une apparence quelque peu étrange, le tranchant de ma main fonçait vers son abdomen, mes ongles acérés prêts à transpercer la peau qui s’offrait à moi. Rapidité, fluidité, souplesse et harmonie… Les maitres mots qu’une Kunoishi se devait d’utiliser.

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